Le super livret occupe une place particulière dans le paysage de l’épargne. Présenté comme un support attractif grâce à un taux boosté temporaire, il s’inscrit pourtant dans la catégorie des livrets bancaires non réglementés, dont les modalités, les taux et la fiscalité sont fixés librement par les établissements. Cette architecture crée un écart important entre l’impression commerciale et la réalité du rendement d’un super livret une fois la promotion passée.
Pour un détenteur de patrimoine, comprendre ces mécanismes est essentiel afin de décider si ce produit mérite une place dans une stratégie structurée.
Définition du super livret : de quoi parle-t-on ?
Un livret bancaire non réglementé
Le super livret est un compte sur livret commercialisé par les banques, sans encadrement de l’État ni plafond réglementaire. Il se distingue ainsi du livret A, du LDDS ou du LEP. Les établissements fixent librement le taux de leur super livret, les frais éventuels, le plafond, les conditions de versement initial et les modalités d’accès.
Le super livret fonctionne sur un principe simple : capital disponible à tout moment, absence de frais ou frais très faible, versements et retraits libres. En pratique, il s’agit d’un produit de liquidité. Son principal argument commercial repose sur un taux promotionnel (aussi appelé "taux boosté") limité dans le temps, généralement entre un et quatre mois.
Positionnement par rapport aux livrets réglementés
À la différence des supports réglementés, les intérêts d’un super livret sont intégralement imposables. La garantie sur les dépôts relève du Fonds de garantie des dépôts et de résolution, dans la limite de 100 000 euros par déposant et par établissement, ce qui le situe dans la même catégorie sécuritaire que les comptes bancaires classiques.
Son intérêt patrimonial dépend donc de deux éléments capitaux : le rendement net après fiscalité et la durée pendant laquelle le taux attractif est réellement appliqué.
Attention aux arnaques : les super livrets constituent un outil fréquemment exploité par les escrocs, qui usurpent l’identité de grandes banques pour proposer de faux placements à des taux très élevés.
Fonctionnement d’un super livret
Taux boosté, taux standard et rendement annualisé
Le taux promotionnel est temporaire et constitue l’élément central de l’offre. Il est destiné à capter des liquidités sur une courte période. La rémunération affichée pendant la promotion ne reflète pas la performance annuelle réelle, puisqu’elle ne s’applique que sur une courte période.
À l’issue de la promotion, le super livret bascule sur un taux standard, généralement nettement inférieur. Le rendement réel dépend donc d’une moyenne pondérée entre le taux promotionnel et le taux standard. Pour un épargnant qui maintient ses fonds sur douze mois, la performance annuelle se rapproche mécaniquement du taux standard, qui constitue l’élément le plus structurant.
Conditions, plafonds et modalités d’accès
Les plafonds appliqués par les banques sont souvent élevés, parfois plusieurs centaines de milliers d’euros ou davantage. Toutefois, le taux boosté n’est souvent appliqué qu’à une tranche d’encours plus limitée. Les versements sont libres, mais un montant initial minimum est habituellement exigé.
Fiscalité appliquée aux super livrets
PFU et barème de l’impôt
Les intérêts d’un super livret sont soumis au prélèvement forfaitaire unique (PFU), composé d’un impôt sur le revenu de 12.8% et de prélèvements sociaux de 17.2%, soit une imposition de 30%. L’épargnant peut aussi opter pour le barème progressif de l’impôt s’il lui est plus favorable.
En effet, pour un épargnant non imposable ou situé dans la tranche de 11%, le barème progressif peut être plus intéressant que le PFU. Par exemple, sur 200 € d’intérêts, un contribuable en tranche à 11% paiera : 22 € d’impôt (11%), + 34.40 € de prélèvements sociaux (17.2%), soit un total de 56.40 €, inférieur au 60 € dus avec le PFU. L’option IR n’est donc favorable que pour les foyers faiblement imposés.
Impact des prélèvements sociaux
La composante fiscale représente 30% du rendement brut dans la majorité des cas. L’érosion est significative, en particulier lorsque les taux standard gravitent autour de 1 à 2%. Une partie importante de la rémunération est donc absorbée par la fiscalité, ce qui n'est bien sûr jamais mis en avant sur les brochures commerciales des banques proposant un super livret.
Comment calculer le rendement net d’un super livret ?
Le rendement mis en avant par les banques est toujours un taux brut, c’est-à-dire avant impôt. Pour connaître ce que rapporte réellement un super livret, il faut convertir ce taux brut en taux net, après application du PFU (prélèvement forfaitaire unique). Ce PFU représente 30% des intérêts : 12.8% d’impôt sur le revenu et 17.2% de prélèvements sociaux.
Le calcul est simple :
- déterminer les intérêts bruts ;
- appliquer les 30% de fiscalité ;
- obtenir les intérêts nets réellement perçus.
Exemple avec un livret à 2% et 10 000 € placés
Intérêts bruts :
10 000 × 2% = 200 €
Fiscalité (30%) :
200 × 30% = 60 €
Intérêts nets réellement perçus :
200 − 60 = 140 € soit un rendement de net de 1.4%
Au final, un livret affiché à 2% brut ne rapporte en réalité que 1.4% net. C’est ce taux net qu’il faut comparer aux livrets réglementés, dont la rémunération est totalement exonérée.
Pourquoi les super livrets sont rarement pertinents dans une stratégie d’épargne
Attractivité limitée une fois le taux boosté passé
Le taux promotionnel constitue un argument d’appel puissant mais temporaire. Une fois la période boostée écoulée, le super livret retrouve un taux standard souvent modeste. Sur une année complète, le rendement réel se rapproche de ce taux standard, ce qui réduit fortement la performance espérée.
Fiscalité pénalisante et rendement net souvent inférieur aux livrets réglementés
Même lorsque le taux standard est correct, la fiscalité réduit significativement la rémunération nette. À l’inverse, les livrets réglementés conservent un rendement net intégral. Un super livret dont le taux brut standard est attractif peut devenir moins performant qu’un livret réglementé une fois les prélèvements appliqués.
Manque de cohérence pour la gestion de long terme
Le super livret n’offre pas de perspective intéressante d’accumulation sur plusieurs années. Le rendement faible, la fiscalité systématique et l’absence d’avantage structurel limitent son intérêt pour la construction patrimoniale. Il ne constitue ni un outil de transmission, ni une enveloppe fiscale, ni un support d’investissement.
Des alternatives plus performantes : livrets réglementés, assurance vie, PEA, PER
Pour la liquidité immédiate, les livrets réglementés (livret A, LDDS) demeurent la base. Une fois ces plafonds atteints, des dispositifs plus structurants peuvent prendre le relais :
Ces enveloppes permettent de capitaliser avec une fiscalité progressive plus avantageuse et une cohérence patrimoniale plus solide.
|
| Rendement brut | Taux standards entre 0.5 et 2 % | 1.7 % | 1.7 % | 1.5 % à 3.5 % selon assureurs |
| Fiscalité | PFU 30 % (ou IR + PS) | Exonéré | Exonéré | Après 8 ans : fiscalité avantageuse (abattement) |
| Liquidité | Très élevée (retraits libres) | Très élevée (retraits libres) | Très élevée (retraits libres) | Liquidité moyenne (délai de rachat) |
| Points forts | Plafond élevé, taux boosté temporaire | Sécurité, liquidité totale, non imposable | Sécurité, liquidité totale, non imposable | Capital garanti, rendement stable, défiscalisation |
| Limites | Fiscalité importante, taux standard faible | Plafond de 22 950 €, rendement parfois inférieur à l’inflation | Plafond de 12 000 €, rendement parfois inférieur à l’inflation | Plus-value imposable, frais de gestion |
Les taux des super livrets pratiqués sur le marché
Niveaux usuels des taux promotionnels et des taux standards
Les taux boostés proposés sur le marché se situent généralement entre 3 et 5%. Cette fourchette reflète une volonté marketing plutôt qu’une logique de rendement structurel.
Les taux standard appliqués après la période promotionnelle se situent le plus souvent entre 0.5 et 2.5%. Ces niveaux (auxquels il faut retirer la fiscalité) définissent le rendement réel pour un épargnant qui laisse ses fonds au-delà de la promotion.
Logique commerciale derrière ces variations
Les super livrets sont utilisés comme un outil d’acquisition de nouveaux clients ou de nouvelles liquidités. Les variations de taux reflètent cette logique. Le taux boosté est conçu pour attirer, tandis que le taux standard reflète la rémunération réellement supportable par l’établissement.
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Points de vigilance
Lisibilité réelle du rendement
La mise en avant du taux promotionnel peut masquer la réalité du rendement annualisé. L’important est de comprendre la contribution effective de chaque période dans la performance annuelle. Il est donc essentiel de ne pas s'arrêter au taux boosté et de prendre le temps de trouver quel est le taux standard.
Rendement brut annualisé = (taux boosté × durée de la promotion / 12) + (taux standard × durée hors promotion / 12)
Exemple : Prenons un super livret affichant un taux boosté de 4% pendant 3 mois, puis un taux standard de 1.5% pour les 9 mois restants.
Le rendement brut annualisé se calcule ainsi : (4% × 3/12) + (1,5% × 9/12) = 1% + 1.125 %, soit un rendement annuel réel de 2.125%. Il faut encore retirer la fiscalité (généralement 30% des gains) pour obtenir le rendement net annuel.
Risques d’arnaques et vérifications réglementaires
Attention : de nombreuses escroqueries circulent autour du terme “super livret”. Des sites non agréés utilisent cette appellation pour proposer des placements prétendument garantis ou à taux “exceptionnels”. Avant toute ouverture, vérifiez systématiquement :
- l’existence réelle de l’établissement,
- son immatriculation ACPR/ORIAS,
- et la couverture par le FGDR.
Un vrai super livret est toujours proposé par une banque régulée : toute promesse trop belle pour être vraie doit alerter.
Super livret Société Générale 4.95%, Revolut 5.95%, Allianz 5.95%… des arnaques très répandues
De nombreuses escroqueries utilisent des noms d’établissements connus pour crédibiliser de faux “super livrets” aux taux prétendument exceptionnels :
- “super livret Société Générale 4.95%”
- “super livret BNP 4.95%”
- “super livret Allianz 5.95%”
- “Revolut super livret 5.95%”
- “super livret européen”
Aucune de ces offres n’existe réellement. Les banques citées ne commercialisent aucun super livret à ces taux. Ces noms sont utilisés pour usurper leur identité et attirer les épargnants. Voici les signes qui prouvent qu’il s’agit d’une arnaque :
- Taux garantis “exceptionnels” très supérieurs aux livrets réglementés (4–6%)
- Utilisation d’un faux site imitant celui d’une vraie banque
- Contacts via WhatsApp, Telegram ou numéros étrangers
- Signature par des “conseillers” non inscrits à l’ACPR ou à l’ORIAS
- Demande de copie de pièce d'identité + justificatif de domicile avant même toute ouverture
- IBAN situé dans un pays étranger (Lituanie, Chypre, Roumanie…)
Rappel important : un super livret véritable est toujours proposé directement sur le site officiel de la banque et jamais via un PDF ou un lien envoyé par message.
Synthèse : dans quels cas peut servir un super livret ?
Si vos livrets réglementés (livret A, LDDS) sont déjà remplis au maximum, le super livret peut ponctuellement servir de solution d’attente, pour stationner un capital sur quelques semaines ou quelques mois avant ré-allocation. Au-delà de ce rôle temporaire, sa pertinence demeure limitée.
Sinon mieux vaut se constituer une épargne de précaution liquide avec les livrets réglementés. Ensuite l’excédent d’épargne peut être orienté vers des supports permettant d’allier rendement et fiscalité maîtrisée (assurance-vie, PER,...). Le super livret ne s’insère donc qu’à la marge d’une stratégie patrimoniale.
FAQs
Qu’est-ce qu’un super livret ?
Un super livret est un livret bancaire non réglementé, dont le taux et les conditions sont librement fixés par les banques. Il inclut généralement un taux boosté temporaire.
Les super livrets sont-ils exonérés d’impôts ?
Non. Leurs intérêts sont soumis au prélèvement forfaitaire unique ou au barème de l’impôt.
Un super livret est-il intéressant pour la trésorerie ?
Uniquement à très court terme. Au-delà de la période promotionnelle, le rendement net est souvent faible.
Quelle est la différence avec un livret réglementé ?
Les intérêts des livrets réglementés sont exonérés d’impôt et leurs taux sont fixés par l’État. Leur rendement net est généralement plus stable.
Quelles alternatives existent pour une épargne plus performante ?
Les livrets réglementés pour la liquidité, puis l’assurance vie, le PEA ou le PER pour investir à moyen ou long terme dans un cadre fiscal plus avantageux.
Quelle banque propose le super livret ?
Plusieurs banques en ligne et établissements traditionnels proposent des super livrets (Revolut, Société Générale, Monabank, Boursorama,...), mais les offres varient fortement selon les périodes. Il est essentiel de vérifier : le taux standard, la durée du taux boosté, le plafond de rémunération promotionnelle et la fiscalité applicable. Toujours privilégier les banques régulées (ACPR/ORIAS) et méfiez-vous des sites se faisant passer pour de grandes enseignes.
Livret A ou super livret : lequel choisir ?
Le Livret A est exonéré d’impôts et propose un taux fixé par l’État. Le super livret, lui, affiche souvent un taux boosté temporaire mais son rendement net est généralement inférieur une fois la fiscalité appliquée. Pour la majorité des épargnants, le Livret A est plus performant et plus stable sur la durée.
PEL ou super livret : quel est le plus intéressant ?
Le PEL est un produit bloqué, orienté vers un futur financement immobilier, avec un taux garanti durablement mais une disponibilité limitée. Le super livret, totalement liquide, convient uniquement pour du court terme. Pour un objectif immobilier ou une épargne progressive, le PEL reste plus cohérent. Pour un placement transitoire, le super livret peut être utile pour quelques mois.